Traiter les crises d’angoisse avec l’EMDR : comment ça marche ?
Les crises d’angoisse peuvent être particulièrement déstabilisantes, avec des symptômes tels que des palpitations, des sensations de suffocation, une peur intense de perdre le contrôle, voire de mourir. De nombreux patients me décrivent ces moments comme s’ils traversaient une véritable tempête émotionnelle. Mais, derrière chaque crise d’angoisse, il y a souvent une histoire enfouie qui demande à être entendue. C’est là que l’EMDR (Eye Movement Desensitization and Reprocessing) peut s’avérer très efficace. Cette méthode de thérapie, encore peu connue du grand public, se concentre sur le retraitement de souvenirs traumatiques qui sont à l’origine de ces crises, même lorsque les patients n’en sont pas toujours conscients.
Dans cet article, je souhaite vous montrer comment j’utilise l’EMDR dans le cadre de mes psychothérapies avec des exemples concrets tirés de mon expérience clinique. Les personnages fictifs suivants représentent des profils courants que je rencontre en consultation et illustrent les différentes manières dont les crises d’angoisse peuvent être traitées grâce à cette technique.
L’histoire de Sophie : la crise d’angoisse qui cachait un souvenir refoulé
Sophie, 35 ans, est venue me consulter après avoir vécu plusieurs crises d’angoisse soudaines. Ces crises se produisaient sans prévenir, souvent dans des moments de calme, par exemple lorsqu’elle regardait un film ou lisait un livre. Sophie décrivait cette expérience comme « quelque chose qui montait en elle », une sensation de panique qui n’avait pas de sens pour elle.
Nous avons commencé les séances d’EMDR en explorant ce qui se passait dans son corps et dans son esprit lorsqu’une crise d’angoisse surgissait. Lors d’une session, Sophie a été surprise par des souvenirs d’une scène oubliée de son adolescence. Elle se revoyait à l’hôpital, à 14 ans, après un accident de ski. Un détail anodin – l’odeur du désinfectant – a suffi pour déclencher cette mémoire refoulée. Sophie avait gardé ce souvenir enfermé, associant inconsciemment cette sensation de panique à des moments de vulnérabilité physique.
À travers plusieurs séances, nous avons pu revisiter cette scène avec l’EMDR, en traitant progressivement l’émotion de panique, le sentiment d’impuissance et l’incompréhension qui s’étaient fixés dans son corps. Peu à peu, ses crises se sont espacées, jusqu’à disparaître. Ce qui semblait être des attaques de panique imprévisibles se sont révélées être la manifestation d’un souvenir mal digéré, qui s’activait lorsqu’elle se sentait détendue, comme un signal de danger à retardement.
Julien : le patient qui se croyait fou
Julien, un jeune homme de 29 ans, s’est présenté en me disant qu’il pensait devenir schizophrène. Ses crises d’angoisse étaient accompagnées de phénomènes de dépersonnalisation et de déréalisation : il avait l’impression de ne plus être lui-même, de se voir de l’extérieur, et avait peur de « perdre le contrôle de sa tête ». Ce type de symptômes est particulièrement effrayant car les personnes concernées se demandent si elles vont « perdre la raison ».
Avec l’EMDR, nous avons rapidement identifié un déclencheur précis : une phrase banale que son père lui avait dite lorsqu’il avait 7 ans : « Si tu continues comme ça, tu finiras par perdre la tête ! » Cette phrase, apparemment sans gravité, avait été intégrée par Julien d’une manière très littérale. À chaque fois qu’il se sentait débordé émotionnellement, cette vieille phrase resurgissait sous la forme d’une crise d’angoisse.
L’EMDR nous a permis de retravailler ce souvenir, en y ajoutant des ressources de sécurité et de compréhension. Julien a pu réaliser que cette phrase appartenait au passé, qu’elle n’était pas une prophétie sur sa santé mentale. Ses crises ont alors progressivement diminué en intensité, et il a cessé de croire qu’il « perdait la tête ».
Carole : la crise d’angoisse qui cachait un abus émotionnel
Carole, 42 ans, consultait pour des crises d’angoisse dès qu’elle devait prendre la parole en réunion. Dans le cadre de son travail, elle devait souvent animer des présentations, et à chaque fois, elle se sentait envahie par un stress incontrôlable, qui la faisait trembler et perdre ses moyens.
Lors de nos premières séances, Carole a évoqué un épisode douloureux de son enfance : son père, très autoritaire, la ridiculisait chaque fois qu’elle osait donner son opinion. Ce souvenir, associé à une forte humiliation, n’avait jamais été exprimé ouvertement, mais il se manifestait à travers ses crises d’angoisse en contexte professionnel.
Avec l’EMDR, nous avons pu travailler sur ces images, en redonnant à Carole un sentiment de sécurité et en déconstruisant le lien entre sa peur de parler et les réactions de son père. À mesure que ces associations négatives se dissolvaient, Carole a retrouvé la capacité de s’exprimer sans se sentir submergée par la panique.
L’EMDR : un outil puissant, mais pas une baguette magique
L’EMDR est souvent présenté comme une méthode quasi-miraculeuse, et il est vrai qu’elle peut apporter des résultats très rapides. Cependant, il est important de comprendre qu’elle n’est pas toujours adaptée à toutes les situations. Si les crises d’angoisse sont liées à des traumas complexes ou à des troubles de l’attachement, un travail de fond est nécessaire avant de pouvoir utiliser l’EMDR de manière efficace.
Les exemples de Sophie, Julien et Carole montrent bien que l’EMDR aide à dénouer les nœuds émotionnels lorsque l’origine des crises est un événement traumatique ou une croyance figée. Mais lorsque les crises d’angoisse sont le symptôme de problèmes plus diffus, comme une difficulté à gérer le stress au quotidien ou un épuisement émotionnel, d’autres approches, comme la thérapie cognitive et comportementale (TCC), la pleine conscience ou des techniques de gestion du stress, peuvent être plus indiquées.
En tant que thérapeute, mon rôle est de m’adapter aux besoins de chaque patient, en utilisant l’EMDR lorsque cela est pertinent, tout en explorant d’autres pistes pour accompagner au mieux chaque personne dans la compréhension et la résolution de ses crises d’angoisse.
En conclusion, l’EMDR peut être un outil très efficace pour traiter les crises d’angoisse en permettant de revisiter des souvenirs douloureux et d’en atténuer l’impact émotionnel. Chaque patient est unique, et c’est en explorant ensemble leur histoire que nous trouvons les leviers de changement qui leur permettront de se libérer de ces tempêtes émotionnelles.
À propos de l’auteur
Frédéric Makhlouf, praticien en psychothérapie, dédié à guider ceux qui souhaitent entamer un parcours de résilience. Mon approche bienveillante encourage chacun à explorer ses difficultés pour retrouver équilibre et vitalité. Prêt à franchir le premier pas? Je vous propose un appel d’écoute pour vous accompagner dans cette démarche.